Les constructeurs d’imprimantes redoublent d’inventivité pour nous faire passer à la caisse. Faisons un rapide tour de l’objet représentant l’obsolescence programmée par excellence, et des techniques des industriels pour vider nos portefeuilles plus rapidement que nos cartouches d’encre.

Imprimante à la rue | Thierry Bouillet

Elle était là, dans la rue, à attendre la rafle. Dès que je l’aperçus, je l’agrippai. « Je te sauverai, petite imprimante. Même si la chirurgie s’avère obligatoire. Même s’il faut te changer toute l’encre de tes veines. Tu ne mourras pas!  » Une fois branchée et installée. Surprise: L’imprimante fonctionne. Sur 4 imprimantes ramassées sur les trottoirs, toutes ont commencé par imprimer correctement une page, avant d’en décider autrement. L’une d’entre elles, une Canon Pixma imprime toujours parfaitement, ce qui m’apparaît complètement incompréhensible pour une imprimante sauvée de justesse des ordures. Alors pourquoi ces imprimantes ont-elles finit par tomber aux mains de la surconsommation?

Le nombre d’amis se plaignant des pannes récurrentes de leurs imprimantes ne faisait qu’augmenter. Au fil du temps, le consommateur a fini par accepter tacitement de se faire explorer le postérieur par les marques. Même sous garantie, une imprimante ne vaut pas le coup d’être envoyé en SAV. Trop lourd. Trop cher. Trop lent. Pour un résultat qui, au mieux, ne fait que reporter l’échéance pour quelques semaines. Face à un ami qui a besoin de conseil, la seule réponse qui m’apparaissait, aussi risible que réaliste, était: « Change d’imprimante, et fais gaffe à ne pas te faire arnaquer sur le prochain modèle » Une réponse qui, bien que toujours d’actualité, ne me satisfaisait pas. J’ai donc enfilé ma casquette de casse-couille de consommateur à tendance écolo, pris le tournevis, et fermé mes orifices. Et on va bien voir ce que Epson, HP, Canon, Samsung, Brother, et les autres, nous cachent, avec plus ou moins d’outrecuidance!

La première des choses que j’ai faite, c’est récupérer de vieilles cartouches dans les sacs de recyclage d’un grand magasin, pour voir leur fonctionnement. Quand je vous disais que j’aimais faire les poubelles! Ceux qui s’y essaieront constateront qu’énormément de cartouches ne sont pas totalement vides, et reviendront rapidement les mains pleines d’encre. Mais alors, est-ce que les industriels nous font jeter des cartouches pleines? Un tantinet culotté pour des entreprises adeptes du GreenWashing. Car si l’on se sort généralement avec des tarifs plutôt attractifs de la machine en elle-même, les cartouches ,elles, coutent un bras!

Il est intéressant de regarder l’intérieur d’une cartouche, généralement bien opaque. (Il ne faudrait quand même pas qu’on en sache trop sur elle!) Une cartouche lambda n’a rien de bien sorcier. Un côté pour l’encre, un autre avec un filtre pour pas que ça coule au moindre balancement de la tête d’impression, probablement.

Une cartouche d

Quant à l’électronique? Un expert vous l’expliquera mieux que moi. Mais souvent, le problème vient de là. La cartouche soi-disant « vide » ne l’est pas forcément. Car la plupart des imprimantes, décomptent, par l’intermédiaire de cette puce électronique sur la cartouche, le nombre de copies imprimées. Et qu’importe que vous imprimiez la plus courte lettre de Voltaire, ou les photos de votre dernière soirée beuverie au format A4 Haute qualité d’impression. Pour l’imprimante, c’est plus ou moins pareil.

Une très bonne vidéo de Stéphane Marty. Allez visiter sa chaîne YouTube Deus Ex Silicium.

Mais certains industriels sont plus tordus. Si à tout hasard vous finissez par ouvrir une cartouche, certaines d’entre-elles savent faire valoir leur R&D. Car les industriels se sont sérieusement creusé la tête sur certaines de leurs cartouches. Alors que l’on pourrait espérer voir les constructeurs dédaigner porter un tout petit peu d’intérêt au confort du consommateur, force est de constater que leur intérêt s’oriente davantage vers une complexification de leurs produits afin d’empêcher toute utilisation qui ne rentrerait pas dans leur plan économique direct. Bref, avec une mise en forme plus compliquée, on empêche l’utilisateur de remplir lui-même ses cartouches, et on fait croire à de la haute technique, alors que ça reste un putain de bout de plastique. Toujours dans le but de nous faire acheter des cartouches supplémentaires.

Cartouche Epson t0711 | Thierry Bouillet

Et il n’y a pas que les cartouches. Car si l’on finit miraculeusement à trouver un compromis pour couillonner le mécanisme des constructeurs et ainsi profiter de la liberté d’utilisation d’un produit que l’on a acheté, certaines imprimantes sont équipé en leur sein de ce même type de puce. Et démonter une cartouche, c’est dur, mais il paraîtra encore plus difficile à la plupart des utilisateurs de démonter leur appareil.

Pire, bien souvent, les machines sont programmé au gaspillage. Au démarrage de l’appareil, il n’est pas rare d’entendre la plupart des imprimantes faire un max d’actions bruyantes. Parfois, cela prend même un certain temps avant qu’elle ne puisse imprimer sa première page. Pourquoi? Elle a besoin de chauffer, oui. On peut comprendre aussi qu’une réinitialisation de la tête d’écriture puisse se lancer aussi. Mais beaucoup d’imprimantes expulsent de l’encre (si onéreusement vendue) sur une sorte d’éponge, dans le but de déboucher les buses. Une opération curieuse quand c’est automatique, mais les constructeurs vous diront que c’est pour une meilleure qualité d’impression. Si je souhaite imprimer une lettre en mode « brouillon », je ne suis pas sûr qu’il soit très utile de tenter de déboucher la totalité des buses utilisées quelques secondes auparavant. A croire que c’est nous qu’on prend pour des grosses buses.

Parmi les pannes courantes, la « panne » la plus casse-couille, c’est encore celle de l’appareil qui refuse d’imprimer tant qu’il n’est pas équipé, soit de la totalité des 4 couleurs, soit de cartouches d’une autre marque. Nom de dieu de bordel de bite en bois! Imaginez un stylo-plume qui refuse d’écrire si vous prenez des cartouches d’une autre marque! L’excuse? Cela « pourrait » endommager l’appareil. Quand bien même. N’ai-je pas le droit de prendre ce risque, quand bien même j’accepte des conditions qui puisse supprimer la garantie de l’appareil? Pas besoin d’ouvrir le capot d’une seule imprimante que déjà je sens les exquises effluves d’emmerdes, savant mélange d’obsolescence programmée et de vente forcée.

Force est de constater que les solutions pour pallier à toutes ces arnaques sont rares. Il existe certes des softs pour remettre à zéro votre compteur d’impression, mais qui n’est pas compatible avec tous les modèles. Parfois, le simple fait de formater votre ordinateur, ou de brancher votre imprimante sur un autre semble avoir un effet « réparateur ». Si des techniciens font un tour par ici, je serai très curieux d’avoir une explication technique à certaines pannes étonnantes et inexplicables. En attendant, n’hésitez pas à démonter totalement votre imprimante pour voir ce qu’elle a dans le ventre. Il y’a beaucoup à apprendre, et souvent pas grand-chose à perdre.

Mettre une cartouche | Thierry Bouillet